Le projet COCO

 

S’interroge sur les différents indicateurs et sur leurs pertinences, utilisés pour qualifier le confort thermique dans les bâtiments sous un climat tropical comme ceux de La Martinique et de Mayotte, et plus largement en Outre-mer.

 

Contexte et enjeux

En climat tropical, la notion confort thermique est l’élément majeur de la consommation énergétique d’un bâtiment. En effet, lorsque le confort thermique des usagers ne peut être atteint par des moyens passifs (ventilation naturelle, protection solaire, végétalisation des abords), des moyens actifs (climatisation) sont mis en œuvre, induisant une forte croissance de ces consommations. En l’absence de changement de cap, en 2050, il pourrait y avoir quatre fois plus de climatiseurs dans le monde (source : AIE).

Le projet COCO, présenté dans le cadre de l’APP OMBRÉE, entend répondre aux objectifs suivants :

  • Informer les acteurs de la construction et forger un discours cohérent sur la possibilité de construire des bâtiments bioclimatiques dans l’Outre-mer ;
  • Sensibiliser les utilisateurs des bâtiments aux paramètres qui constituent la notion de confort thermique dans le but de réduire la consommation de la climatisation ;
  • Définir des méthodes d’évaluation et des indicateurs du confort thermique pour les bureaux d’études techniques et experts de l’efficacité énergétique dans l’Outre-mer.

Une utilisation rationnelle de la climatisation et de l’énergie
L’usage de la climatisation représente entre 50 et 60% de la consommation dans les bâtiments tertiaires dans les territoires ultra-marins. Il est donc primordial de mettre en place des actions de sensibilisation des occupants des bâtiments tertiaires et résidentiels sur la notion confort thermique afin qu’ils soient en mesure d’être acteurs de leur confort passif (ouvrir une fenêtre, faire fonctionner un brasseur d’air avant la climatisation…) et de recourir à un usage rationnel de la climatisation.

La sensibilisation doit également ingérer l’usage des brasseurs d’air qui représente un moyen d’améliorer le confort thermique avec une consommation électrique jusqu’à 40 fois moins importante que celle de la climatisation. Mais des réticences se font sentir à Mayotte et à la Martinique pour mettre en œuvre des brasseurs d’air dans les bâtiments tertiaires en particulier. Cette réticence trouve ses racines d’une part dans un maque d’acceptation socio-culturelle de l’équipement et d’autre part, dans un manque de connaissance de ses modes d’usage (les brasseurs d’air permettent d’allonger la période en fonctionnement passif des bâtiments et permettent également d’augmenter les températures de consigne de la climatisation en réduisant la température ressentie de l’ordre de 4°C).

Principaux résultats de l’étude : des référentiels sur le confort inadaptés aux Outre-Mer
Les ultramarins, acclimatés aux conditions de chaleur et d’humidité tropicales, manifestent un ressenti de confort différent des résidents de climats tempérés. La tolérance est de 2°C supplémentaires en moyenne, notamment lorsque la ventilation est satisfaisante.

  • Sans circulation d’air, du confort jusqu’à 28°C
    Avec une vitesse d’air nulle ou très faible (moins de 0,2 m/s), COCO mesure un taux de 83 % de confort pour une température de 28°C et pour une hygrométrie pouvant atteindre 80 %. Dans les mêmes conditions, un métropolitain serait en inconfort dès 26°C.
  • Sous un brasseur d’air, du confort jusqu’à 31°C
    Avec une vitesse d’air de 0,5 à 1 m/s, soit les conditions de ventilation sous un brasseur d’air, 85% des personnes se considèrent en conditions de confort thermique jusqu’à 31°C pour un taux d’humidité compris entre 65 et 75%.

Avec la climatisation, une source régulière d’inconfort froid
L’étude COCO révèle que le taux d’inconfort est plus faible lorsque les locaux sont climatisés. Toutefois, à l’inconfort chaud, se rajoute une sensation de froid excessif. En Martinique, l’étude a comptabilisé 7% d’inconfort chaud et 7% d’inconfort froid sur l’échantillon climatisé.

Toutes les personnes se déclarant en inconfort lié au froid lors de l’étude COCO étaient en milieu climatisé. En dessous de 26°C, plus de 25 % se déclarent en condition d’inconfort froid en présence d’une vitesse d’air.

Les brasseurs d’air, un équipement trop peu mobilisé
Économes en énergie et moins coûteux que la climatisation, les brasseurs d’air créent des conditions de confort thermique et un ressenti de fraîcheur dans une pièce. L’étude COCO révèle qu’avec une légère vitesse d’air, 80 % des sondés ressentent du confort jusqu’à 28°C. Sous un brasseur d’air, 85% des personnes se considèrent en conditions de confort thermique jusqu’à 31°C.

Un habillement supérieur aux recommandations, notamment à l’école
Dans l’enseignement à La Martinique, l’uniforme est de rigueur. L’habillement des élèves est généralement composé de chaussures fermées, pantalon épais de type jean et polo à manche courte. Ce type d’habillement n’est pas adapté pour des bâtiments fonctionnant en ventilation naturelle en climat tropical, mais plutôt pour des bâtiments climatisés.

Dans les bureaux, du confort jusqu’à 28 °C
Plus de 90 % des sondés indiquent être en situation de confort dans les bureaux jusqu’à 27°C. A 28°C, le taux de confort se maintient légèrement en dessous de 80 %, et il chute à 55 % à 29°C.

On constate qu’il est possible de climatiser à une température entre 26 et 28°C tout assurant une part de confort satisfaisante. La climatisation fait chuter l’humidité, ce qui est également favorable.

Le confort sous-estimé des bâtiments bioclimatiques
Les conditions pour concevoir un bâtiment confortable sans climatisation sont réputées très difficiles à atteindre en climat tropical. Les bureaux d’études et professionnels du bâtiment s’appuient pour évaluer le confort d’une future construction sur le diagramme de Givoni, conçu sur la base du ressenti en climat méditerranéen, où alternent un été sec et un hiver rigoureux.

L’analyse des données collectées par l’étude COCO démontre que ce référentiel n’est pas pertinent pour l’Outre-mer. Les résidents de Mayotte et de Martinique interrogés n’ont pas la même perception du confort que celle décrite par le diagramme de Givoni.

En climat tropical, une plus grande tolérance à la chaleur et à l’humidité
Une large majorité des personnes interrogées lors de l’étude COCO (71 %) ont déclaré être en situation de confort, malgré une température médiane de 29°C. Plus de la moitié du panel (51 %) a déclaré ne pas ressentir de chaleur.

Une part significative des personnes interrogées déclare ainsi être en situation de confort au-delà des limites habituellement admises. C’est largement le cas à des températures entre 26 et 28°C avec une humidité de 50 à 80 %. En l’absence de ventilation, on constate une chute du taux de confort à partir de 29°C.

Dès lors qu’on mesure une ventilation légère, naturelle ou artificielle (brasseur d’air), plus de 60 % des sondés déclarent confortable une température de 32°C, et près de 40 % n’éprouvent pas de chaleur.

Faire changer la conscience collective
L’étude COCO démontre la possibilité de confort en adoptant des pratiques de construction bioclimatiques de bon sens, telles que la végétalisation de l’environnement du bâtiment, l’isolation des toitures, le recours aux brasseurs d’air et à la protection solaire. La climatisation n’apparaît pas comme une condition indispensable au confort thermique.

Le confort d’été, un enjeu en métropole aussi
Jusqu’à présent, les critères scientifiques de confort thermique pour la construction de bâtiments bioclimatiques, hérités de la métropole, étaient basés sur des enquêtes réalisées en climat méditerranéen.

Le secteur de la construction et du BTP a ainsi été encouragé à climatiser à outrance les bâtiments en climat tropical, en se basant sur des hypothèses inadaptées.
L’enquête réalisée dans le cadre de COCO auprès de 4 118 personnes démontre que des conditions de confort sont possibles en climat tropical même sans climatisation, ce qui apporte un argumentaire scientifique solide en faveur de la ventilation naturelle et de la conception de bâtiments bioclimatiques.

Ces travaux alimenteront les bureaux d’études dans l’Outre-mer et en métropole, où le rôle de la circulation de l’air dans le confort d’été est un enjeu croissant face au changement climatique.

 

Pour en savoir plus, le guide COCO est disponible ici !

 



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